Mon histoire du jour commence en 2009 avec la parution du livre de William Ferris Give My Poor Heart Ease: Voices of the Mississippi Blues (University of North Carolina Press), suivie en 2013 d’une superbe édition française chez Papa Guédé, Les voix du Mississippi, accompagnée d’un CD de 22 titres et de 6 courts-métrages totalisant 55 minutes. Né le 5 février 1942 à Vicksburg, Mississippi, Ferris est un collecteur essentiel des traditions folkloriques dans son État natal. Professeur d’anthropologie, auteur d’ouvrages référents comme Blues from the Delta, producteur, réalisateur, photographe et découvreur avisé de talents, il a mené d’importantes campagnes dans les années 1960 et 1970. Loin des circuits classiques et avec des moyens limités, ces enregistrements de terrain (field recordings) n’ont pas le même écho que les rééditions « classiques », qui portent en outre souvent sur des enregistrements connus. Ferris a récolté un patrimoine unique directement auprès des bâtisseurs de cette culture, qui se livrent sans fard, dans le cadre de leur quotidien, loin de l’univers des studios modernes qui souvent édulcorent un art par essence primaire. C’est dans ces contextes, chez eux et « sur le vif », quand ils ouvrent leurs cœurs, ou dans leurs églises, où les chœurs s’ouvrent, qu’ils offrent le meilleur du blues et du gospel (texte adapté de mon article du 9 décembre 2018).

Et en 2018 justement, en collaboration avec Dust-to-Digital, Ferris a sorti « Voices of Mississippi – Artists and Musicians Documented by William Ferris », une anthologie qui s’appuyait cette fois sur trois ouvrages publiés par la University of North Carolina Press, Give My Poor Heart Ease: Voices of the Mississippi BluesThe Storied South: Voices of Writers and Artists (2013) et The South in Color: A Visual Journal 2016). L’ensemble comprend trois CD thématiques comptant 79 titres, 27 pour le blues, 26 pour le gospel et 26 pour les entretiens, sept films totalisant cette fois 128 minutes et un livre illustré de 120 pages (lire mon article du 9 décembre 2018). Le 10 février février 2019, cette anthologie a reçu deux Grammy Awards (lire mon article du 25 mars 2019). Fin 2018, Ferris sera également le commissaire d’une exposition au Pavillon populaire de Montpellier dans l’Hérault, I Am a Man – Photographies et luttes pour les droits civiques dans le Sud des États-Unis, 1960-1970 (lire mon article du 15 décembre 2018).

Et voilà que ce cher « Bill » Ferris fait reparler de lui en ce mois de septembre 2021 ! Le 14 septembre dernier, il a mis sur pied un spectacle multimédia intitulé « Voices of Mississippi », basé sur le coffret récompensé de deux Grammy Awards, avec des photos, des vidéos, des narrations et de la musique live assurée par Shardé Thomas, Cedric Burnside, et Luther et Cody Dickinson des North Mississippi Allstars. Cela s’est déroulé au Gertrude C. Ford Center for the Performing Arts à l’université du Mississippi, à Oxford. Quant à l’exposition I Am A Man: Civil Rights Photographs in the American South, 1960–1970, elle tournera en différents lieux (détails à cette adresse) aux États-Unis de janvier 2022 à janvier… 2027 ! Et parallèlement, Ferris a publié I AM A MAN: Photographs of the Civil Rights Movement, 1960-1970 (University Press of Mississippi)… Quelle santé !

Manifestant en deuil au King Memorial Service, 1968 © : Bob Adelman.