Hier, soit le 22 septembre 2021, un communiqué sur la page Facebook officielle de John Mayall commençait ainsi : « J’ai décidé, compte tenu des risques dus à la pandémie et de mon âge avancé, qu’il était temps pour moi de raccrocher mes chaussures de route. » Cela signifie tout simplement que le principal acteur du blues britannique ne fera plus de grandes tournées internationales, et qu’il se contentera de concerts locaux près de chez lui en Californie, voire peut-être d’apparaître très ponctuellement au-delà. On ne saurait s’en étonner. Mayall fêtera ses quatre-vingt-huit ans le 29 novembre prochain, et il avait récemment connu des alertes côté santé. Ainsi, en 2018, une pneumonie l’avait contraint d’annuler plusieurs concerts. Et même si ses récentes prestations démontraient qu’il avait de beaux restes, son corps lui a sans doute lancé des signes, et on comprend la décision d’un homme dont la sagesse n’est pas la moindre des qualités.
Je ne referai pas ici la longue histoire de John Mayall, né le 29 novembre 1933 à Macclesfield en Angleterre, tant elle est connue, et je me contenterai des grandes lignes. Tout débute en 1956 (il y a soixante-cinq ans !) avec la création d’un premier groupe, Powerhouse Four, puis au sein du Blues Syndicate en 1962. L’année suivante, Mayall fonde les Bluesbreakers, qui accompagnent John Lee Hooker en tournée en 1964. La même année voit l’enregistrement de son premier album chez Decca, un live intitulé « John Mayall Plays John Mayall » qui sort en mars 1965, avec le guitariste Roger Dean, dont ce sera la seule heure de gloire… Dès le mois d’avril, Mayall remplace Dean par un certain Eric Clapton et change de dimension, surtout avec la sortie en juillet 1966 du disque « Blues Breakers With Eric Clapton », très certainement le meilleur album du blues britannique.
Mais Clapton ne reste pas et s’en va fonder Cream. Mayall ne se démonte pas et recrute Peter Green, un superbe styliste qui le quitte à son tour pour lancer Fleetwood Mac, après le remarquable album « A Hard Road » en 1967. Mayall rencontre alors Mick Taylor, un jeune guitariste de dix-huit ans, qui apporte une nouvelle marque avec une slide virtuose, avec lequel il a le temps de graver trois albums, « Crusade », « Bare Wires » et « Blues From Laurel Canyon ». Mais cette fois, ce sont carrément les Rolling Stones qui engagent Taylor suite à la mort de Brian Jones le 3 juillet 1969… Ainsi, en moins de cinq ans, les Bluesbreakers de John Mayall ont vu passer en leur sein les futurs guitaristes de trois groupes majeurs de rock, Cream, Fleetwood Mac et les Rolling Stones ! John Mayall décide alors de s’installer à Laurel Canyon en Californie, un État qu’il ne quittera plus.À partir des années 1970, il donne de nouvelles orientations à sa carrière, en particulier vers le jazz, non sans réussite. Durant les décennies suivantes, il reviendra toutefois progressivement au blues, continuant de tourner et d’enregistrer abondamment avec une qualité constante, tout en lançant de nouveaux brillants guitaristes, de Coco Montoya à Carolyn Wonderland en passant par Buddy Whittington. Immensément populaire et reconnu à sa juste valeur, il fera en outre preuve d’une étonnante longévité. Sa voix singulière haut perchée a bien passé l’épreuve du temps, tout comme son jeu de piano et d’harmonica (je ne l’ai en revanche jamais trouvé très crédible à la guitare…). Mais s’il se met aujourd’hui en semi-retraite, ce n’est pas la fin de sa carrière pour autant : « Je veux continuer à partager mon amour du blues avec vous ». Et d’annoncer la sortie le 21 janvier 2022 d’un nouvel album chez Forty Below Records, intitulé « The Sun Is Shining Down ». D’aucuns verront la fin d’une ère dans l’annonce de cette mise en retrait, mais avec John Mayall, le soleil brille toujours et le blues ne se couche jamais…
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