Pour 2024, je vous propose deux listes des dix albums et des cinq livres qui ont selon moi marqué cette année, et début 2025, je publierai mes Top 10 et Top 5 dans les deux catégories. Le troisième sur ma liste de disques est le dernier album de Jontavious Willis, intitulé « West Georgia Blues », sorti chez Strolling Bones Records. Il s’agit du troisième album de ce chanteur et multi-instrumentiste (guitare, harmonica, banjo et peut-être bientôt piano…) âgé de seulement vingt-huit ans. Les deux premiers étaient déjà excellents mais le bluesman change cette fois de dimension et s’invite dans la cour des grands. En juillet dernier, Jontavious a bien voulu répondre à mes questions et vous pouvez lire cette interview dans le numéro 256 de Soul Bag actuellement en vente. Cet artiste fascine à plusieurs titres. Par sa maturité, par sa connaissance de l’histoire de sa musique et de sa culture, par son aptitude à revitaliser les thèmes ancestraux du blues (il se base sur les textes des pionniers mais il écrit toutes ses chansons), par son attachement à ses origines, et simplement par sa voix et son jeu de guitare protéiformes. Jontavious Willis, ou comment redonner ses lettres de noblesse au Country Blues. L’album se commande à cette adresse, et, outre deux extraits en écoute, Lost ball et Lula Mae, vous trouverez ci-dessous le texte de ma chronique publiée dans le numéro 256 de Soul Bag.
JONTAVIOUS WILLIS
WEST GEORGIA BLUES
BLUES TRADITIONNEL
Cet album installe le bluesman de 28 ans parmi les meilleurs de notre époque. Jontavious fascine d’abord avec sa voix dont il se sert à merveille pour faire vivre ses chansons, pour les habiter, et sa guitare agit en habile complice. Très attaché à ses origines, à sa famille et à sa terre (West Georgia blues a cappella pour ouvrir), il touche particulièrement quand il interprète du Piedmont blues (Charlie Brown blues, Rough time blues). Mais son Country blues au sens large va bien au-delà : Broken hearted moan, Who’s gonna hear it? et Time brings about a change dégagent une profonde émotion, mais Squirrlin’ mama joue l’humour (avec la mère-écureuil !). Ses textes sont une autre force. Les thèmes sont ceux des pionniers du blues (dont il connaît à merveille le répertoire) qu’il retranscrit à notre époque, par exemple sur Too close to the finishing line et Ghost woman (« I went to the graveyard, I fell down on my knees, ghost woman, why don’t you come around no more ?). Dans le genre, il explore des terres rares, en réincarnation de Tommy Johnson sur Earthworm basement blues (« I don’t want you here just ‘cause I’m feelin’ down, I like the blues so low you gotta find me in the earthworm basement ») ou quand il erre sans repères sur l’étouffant Lost ball (« I’ll keep on rollin’ til I’ll make it to some good girl’s door ») accompagné d’un groupe électrique. Dans cette formule, il flirte parfois avec le Hill Country blues : Lula Mae et l’instrumental Jontavious’ West Georgia grind. L’ensemble se complète de deux chansons plus « légères , Keep your worries on the dance floor, effectivement dansant, et A lift is all I need aux accents jazzy. En thaumaturge, Jontavious est sans doute actuellement le seul bluesman capable d’utiliser et valoriser ainsi le passé pour en faire notre présent.
© : Daniel Léon / Soul Bag.
Les derniers commentaires