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Au programme de mon émission sur YouTube, Jack Owens (rubrique « Un blues, un jour »), et Robert Pete Williams (rubrique « Sur scène »).

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© : Bill Steber Photography / Deskgram

Jack Owens, né le 17 novembre 1903 (selon les éléments les plus récents, plusieurs sources continuant de citer 1904, plus rarement 1906), nous a donc quittés le 9 février 1997 à l’âge de 93 ans, il y a aujourd’hui 22 ans. Il figure parmi les fondateurs d’un blues rural parmi les plus étonnants et les plus émouvants qui soient, qui prit forme autour de la petite ville de Bentonia, entre Yazoo City et Jackson, à deux pas de la limite sud-est du Delta. Jack Owens a justement vu le jour tout près de Bentonia, à Dover Precinct, ses parents étant George Nelson et Celia Owens. Son nom de naissance est donc L. F. Nelson, mais son père l’ayant abandonné alors qu’il avait seulement 5 ou 6 ans, il a conservé celui de sa belle-famille qui l’a élevé. Les origines de son influence sont peu documentées, même s’il semble avoir appris très jeune la guitare. Son père George Nelson, né en 1881, musicalement actif dans la région au tournant des XIXe et XXe siècles, pourrait lui avoir appris les rudiments de l’instrument avant de l’abandonner. Un oncle, Will Owens, lui aussi musicien local, aurait complété son « enseignement » en la matière, car il apprendra rapidement divers instruments dont la flûte (fife), le violon et le piano, même s’il privilégiera ensuite la guitare. Bien entendu, toutes ces personnes ne nous laissent aucune trace discographique…

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C’est également le cas d’Henry Stuckey (1897-1966), que l’on peut toutefois le considérer comme le fondateur du blues de Bentonia sur la base de témoignages de guitaristes locaux qui l’ont fréquenté, qu’il s’agisse justement de Jack Owens et de Skip James pour les pionniers, puis de Cornelius Bright (1916-1991) et bien entendu de Jimmy « Duck » Holmes (né en 1948)… Car Stuckey se distinguait par son jeu de guitare surprenant, polyrythmique, complexe et basé sur l’emploi d’accords mineurs, qu’il aurait appris auprès de soldats bahaméens durant la Première Guerre mondiale… en France ! Si Skip James va enregistrer dès 1931 des faces essentielles qui vont révéler le blues de Bentonia au monde, Owens se soucie peu de faire carrière dans la musique. Il joue pour son voisinage, se consacre aux travaux agricoles, fait un peu d’alcool de contrebande (il finira par obtenir une licence) et s’occupe d’un juke joint avec sa femme, en fait une pièce de sa maison dans laquelle il fait de la place le week-end pour que ses visiteurs aient assez de place pour danser… Les années passant, il s’associera plus tard avec l’harmoniciste Benjamin « Bud » Spires (né en 1931, le fils d’Arthur « Big Boy » Spires, chanteur et guitariste qui joua avec Lightnin’ Hopkins avant de faire carrière à Chicago), et sa réputation commence à dépasser les « frontières » de sa région. En outre, dans les années 1960, les travaux d’ethnomusicologues et d’amateurs de blues « authentique » (nous sommes en plein Blues Revival) favorisent la découverte d’artistes confinés dans leur univers rural. Ainsi, en 1966, Jack Owens est découvert par le célèbre David Evans, pour lequel il enregistre le 7 septembre d’abord deux titres (B & O Blues et Devil Got My Woman, puis en 1970 avec Spires l’album complet « It Must Have Been The Devil – Mississippi Country Blues by Jack Owens & Bud Spires » (sorti l’année suivante par Testament).

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Puis Owens va attirer d’autres « dénicheurs » de talents venus l’enregistrer chez lui. Ce sera tout d’abord l’Italien Gianni Marcucci pour le label Albatros, pour un album gravé en 1978 et sorti l’année suivante, « Bentonia Country Blues », complété d’un autre avec des inédits paru bien plus tard en 2013 chez Mbirafon (« Blues At Home 8 »), couvrant la période 1978-1982. Owens signera aussi quelques faces pour les Autrichiens de Wolf (« Jack Owens & Eugene Powell – The Last Giants of the Mississippi Blues »), apparaîtra sur le « Blues Songbook » d’Alan Lomax (Rounder, 2003), et surtout, en 1992, dans le film de Robert Mugge Deep Blues. La même année, à 88 ans, il prend pour la première fois l’avion pour une tournée européenne qui sera suivie d’autres malgré son âge avancé, car Owens se produira jusqu’à son dernier souffle. Sa musique représentait donc le blues de Bentonia, unique en son genre et différent de celui du Delta pourtant proche, avec un chant plaintif marqué par le falsetto et des textes plutôt sombres, même si Owens ne fit pas un usage aussi prononcé à la guitare de la gamme mineure qu’un Skip James par exemple. On le rapprochera davantage du dernier grand continuateur de ce style, Jimmy « Duck » Holmes. Pour mon émission, j’ai choisi une des premières faces d’Owens de 1966 pour David Evans, Devil Got My Woman.

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Jack Owens et Bud Spires à Bentonia en 1970. © : Davis Evans / Masters of Traditional Arts.

 

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En deuxième partie d’émission, je tenais à revenir dans cette rubrique du samedi dédiée aux concerts sur le Newport Folk Festival, et ce ne sera sans doute qu’une première occasion… Ce festival consacrera une bonne partie de son programme au blues dès sa fondation en 1959 avec des artistes comme Odetta, Bo Diddley, Gary Davis, Barbara Dane, Brownie McGhee et Sonny Terry. Au début « concurrencé » dans le domaine par le Newport Jazz Festival, puis annulé en 1961 et 1962, il jouera ensuite dans les années 1960 un rôle fondamental dans la propagation du blues, au moment où les États-Unis « redécouvraient » en quelque sorte cette musique, au plus fort d’une période bien connue sous le nom de Blues Revival, le renouveau ou la renaissance du blues. Cela correspond aussi au lancement à partir de 1962 des tournées de l’American Folk Blues Festival, qui accéléreront cette reconnaissance qui deviendra rapidement internationale.

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Ainsi, le festival de Newport fut un pivot de cette double évolution, et il accueillit durant les années 1960 tous les plus grands bluesmen, ceux dont la carrière était déjà bien établie comme d’autres que l’on découvrait ou redécouvrait après de longues interruptions de carrière, justement. L’édition de 1964 fut de ce point de vue particulièrement édifiante et même historique, et le disque ensuite sorti par Vanguard (« The Blues At Newport 1964 / Complete Edition ») donne une idée du niveau de l’affiche car on y entend Fred McDowell, Sleepy John Estes, Doc Reese, Robert Pete Williams, Mississippi John Hurt, Skip James, Robert Wilkins, Elizabeth Cotten et Willie Doss. Dans le cadre de mon émission, j’ai bien évidemment pris un extrait de ce disque, qui met en scène l’extraordinaire chanteur et guitariste Robert Pete Williams, Levee Camp Blues.

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