Au programme de mon émission sur YouTube, Odetta (rubrique « Un blues, un jour ») et Cedric Burnside (rubrique « To of Blues »).
Je n’oublierai jamais le concert donné par Odetta en 2003 au festival Cognac Blues Passions, dont elle était cette année-là la présidente d’honneur. Artistiquement, en 90 minutes (peut-être moins, en fait je ne me souviens plus de la durée du show !), elle avait revisité de sa voix agile, mouvante et toujours expressive les principaux genres de la musique populaire américaine, folk, spirituals, gospel, blues… Mais plus encore, elle dégageait un incroyable charisme quand elle s’adressait au public pour expliquer son combat pour les causes qui lui tenaient à cœur. Car cette grande dame ne fut pas seulement une chanteuse, une musicienne, une compositrice et une actrice accomplie, elle guida aussi un peuple, et durant toute sa vie elle se battit en faveur des droits civiques et de la reconnaissance de sa communauté. En ce 31 décembre qui est aussi une période de vœux, je suis donc particulièrement heureux de rendre hommage à cette dame qui était bel et bien une messagère de la paix, de la sagesse et de la fraternité.
Originaire de Birmingham en Alabama, où elle naquit donc le 31 décembre 1930, il y a 88 ans, Odetta Holmes grandit toutefois à Los Angeles où elle apprend le chant lyrique. Mais elle ne suit pas la voie de l’opéra et tourne avec des compagnies de théâtre musical, ce qui lui vaut d’être aussi au contact de musiciens de folk à la fin des années 1940, dans un genre qui l’intéresse beaucoup plus. À San Francisco, elle fait notamment la connaissance en 1953 de Lawrence B. « Larry » Mohr, un chanteur et banjoïste amateur de folk et de blues. L’année suivante, Odetta inaugure sa carrière discographique et le duo signe son seul album pour Fantasy, « Odetta & Larry », plus connu sous le titre « The Tin Angel »(Original Blues Classics, 1993), du nom du club dans lequel il a été enregistré. La carrière d’Odetta prend alors son envol avec une série d’albums qui mettent en lumière son talent éclectique, certains étant franchement remarquables : « Odetta Sings Ballads and Blues »(Tradition, 1957), « At the Gate of Horn »(Tradition, 1957), « Odetta Sings the Ballad for Americans and Other American Ballads »(Vanguard, 1960), « At Town Hall »(Vanguard, 1962), « Odetta and the Blues »(Riverside, 1962, avec un orchestre de… jazz !) et « Odetta Sings Folk Songs »(RCA Victor, 1963).
Parallèlement, Odetta mène également un beau parcours d’actrice de télévision et au cinéma avec une cinquantaine de rôles à son actif. Bien entendu, elle s’investit donc activement dans la lutte en faveur des droits civiques et prend part à des événements historiques dont la Marche sur Washington, et des personnages de la stature de Rosa Parks et Martin Luther King se déclareront parmi ses premiers fans. Car si sa musique est ancrée dans la tradition populaire, elle fit partie par ses textes des chanteuses dites engagées en s’inscrivant dans le courant des protest songs. Ce n’est pas pour rien qu’elle a influencé énormément de monde, dont bien sûr Joan Baez et Bob Dylan, mais aussi Mavis Staples et Harry Belafonte, ou encore Janis Joplin, ce qui peut davantage surprendre… Et de son côté, elle a souvent revendiqué l’héritage artistique de gens comme Lead Belly et Woodie Guthrie. Seule sa vie privée sera un peu plus compliquée et ponctuée de quelques divorces, elle partagera d’ailleurs un temps la vie du grand bluesman Louisiana Red, mais de toute façon ceci ne nous regarde pas ! Bravo et merci madame Odetta pour votre œuvre essentielle… Odetta nous a quittés le 2 décembre 2008 à 77 ans. Pour mon émission, j’ai retenu un titre issu de son album en public de 1962, « At Town Hall », Another Man Done Gone. La grande dame est seule, a cappella, magistrale, unique…
Pour la deuxième partie de mon émission, je n’avais pas encore eu l’occasion d’évoquer la liste des nominés de la prochaine édition des Grammy Awards qui rendra son verdict le 10 février 2019. Il était donc bien temps de le faire pour ma dernière rubrique « Top of Blues » de cette année 2018. Il y a 84 catégories dont vous trouverez la liste complète sur le site officiel, je vais donc m’arrêter sur les deux qui concernent directement le blues, celle du meilleur album de blues traditionnel et celle du meilleur album de blues contemporain. Pour le blues traditionnel, les nominés sont donc Elvin Bishop, Cedric Burnside, Buddy Guy, le duo Ben Harper/Charlie Musselwhite et Maria Muldaur. Pour le blues contemporain, les élus sont Fantastic Negrito, Teresa James, Danielle Nicole, Boz Scaggs et Victor Wainwright. Je vous avoue qu’en lisant les noms pour le blues contemporain, j’ai cru un instant m’être trompé de catégorie ! Mais bon, ce n’est pas la première fois que les Grammys se distinguent avec des choix incohérents et fantaisistes. J’ai un immense respect pour Buddy Guy mais il doit avant tout à son seul nom d’être là : s’il sortait un album de flûte andine ou un autre de musique de chambre, le jury des Grammys trouverait encore le moyen de le sélectionner dans la catégorie blues traditionnel. Côté blues contemporain, s’il faut souligner la présence du chanteur et pianiste Victor Wainwright pour son excellent dernier album « Victor Wainwright & The Train »(Ruf), que je vous recommande sans réserve, il y avait sans doute d’autres alternatives que les autres nominés…
Dans le cadre de mon émission, j’ai opté pour Cedric Burnside dans la catégorie blues traditionnel, avec un extrait de son dernier CD, « Benton County Relic », sorti chez Single Lock. Le petit-fils et ancien batteur de R. L Burnside a parfaitement assimilé le Hill Country Blues, qu’il sait moderniser avec des sonorités actuelles. Donnant aujourd’hui plus de place au chant et à la guitare, il sait installer des ambiances prenantes et lancinantes. C’est le cas sur Hard to Stay Cool, que j’ai donc choisi pour mon émission.
Bien entendu, pas question de conclure cet article sans vous souhaiter un excellent réveillon et une année 2019 qui vous comblera de bonheur et de joie !
Les derniers commentaires