En tournée

Au programme de mon émission sur YouTube, Johnny « Guitar » Watson (rubrique « Un blues, un jour ») et Melvin Taylor (rubrique « En tournée»).

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© : Discogs

L’histoire du blues ne manque pas de stylistes de la guitare et Johnny « Guitar » Watson fait assurément partie des plus captivants. Cela fait tout juste 23 ans qu’il nous a quittés, le 17 mai 1996 à l’âge de 61 ans. Les circonstances de sa mort ne sont pas si courantes et méritent d’être rappelées : Watson a été en effet victime d’un malaise cardiaque en plein concert lors d’une tournée au Japon, et il est mort peu après à l’hôpital. C’est d’autant plus triste que cette tournée marquait son retour après une longue absence d’une quinzaine d’années sur scène, hormis quelques rares apparitions ponctuelles… Né John Watson Jr. le 3 février 1935 à Houston au Texas, il est d’abord initié au piano par son père, mais il est bien plus attiré par les sonorités de guitaristes comme T-Bone Walker et Clarence « Gatemouth » Brown. Il apprend donc très vite la guitare et côtoie dès l’adolescence d’autres maîtres locaux de la 6-cordes comme Albert Collins et Johnny Copeland.

Et quand il s’installe à l’âge de 15 ans à Los Angeles, suivant sa mère après la séparation de ses parents, il dispose déjà d’un bagage conséquent qui l’aide à s’imposer rapidement, à la fois comme chanteur, pianiste et guitariste. Car il ne faut pas oublier qu’il chantait également très bien… Sa précocité se confirme et il apparaît sur disque à seulement 17 ans, en 1952 avec Chuck Higgins avec lequel il joue surtout du piano, et dès l’année suivante sous le nom de Young John Jackson pour le label Federal. Puis il délaisse le piano et les choses vont très vite : il importe en effet de souligner que dès ses premières années, il affirme un style avant-gardiste à la guitare, en usant notamment d’effets comme le feedback et la reverb. Et durant cette période initiale, soit les années 1950 et 1960, il enregistre plusieurs singles puis albums dans une veine texano-californienne, avec des titres qui mettent en lumière son jeu novateur (Space guitar en 1954), aux côtés d’autres qui deviendront des classiques incontournables de son répertoire (Gangster of love en 1957).

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© : fanpop

Puis il réoriente de façon spectaculaire sa musique pour répondre aux nouvelles attentes du public. Il la teinte fortement de funk et marque son époque dans ce registre somme toute assez peu répandu, d’autant que son aisance instrumentale lui permet de ne pas trahir l’esprit du blues. Son influence sera considérable dans le blues, le funk, la pop, le rock, de Jimi Hendrix aux frères Vaughan en passant par Frank Zappa qui fera appel à lui sur plusieurs albums. Sa musique sera aussi très appréciée des rappeurs, au point que certains le considèrent aussi, et ça n’a rien de farfelu, comme un précurseur du hip-hop… Watson connaîtra une période trouble marquée par la drogue et la perte dramatique de son ami le chanteur et pianiste Larry Williams (suicide ? règlement de compte ?), et cessera donc de tourner durant de longues années. Mais il continuera d’enregistrer jusqu’à sa mort prématurée, pour compter au final une trentaine d’albums sur lesquels il déçoit rarement. Je ne les ai pas tous écoutés mais j’apprécie particulièrement son premier album « Johnny Guitar Watson » (King, 1963), « The Larry Williams Show Featuring Johnny ‘Guitar’ Watson » (Decca, 1965), « Larry Williams & Johnny Watson – Two for the Price of One » (OKeh, 1967), « Ain’t That a Bitch » (DJM, 1976), « At Onkel Pö’s Carnegie Hall Hamburg 1976 » (Jazzline, 2017, mais concert de 1976) et la compilation de deux albums de 1979 et 1980 « What the Hell Is This? & Love Jones » (Robinsongs, 2013). Dans mon émission, on le voit en public à Leverkusen en 1996, soit l’année de son décès, avec peut-être sa chanson la plus célèbre, Gangster of Love.

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© : Paul Bergen/Redferns/Getty/Fip

 

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© : Dan Machnik / AllMusic

Je suis particulièrement content aujourd’hui de consacrer une rubrique à Melvin Taylor car ses concerts m’avaient généralement laissé sur ma faim. Je l’ai vu à plusieurs reprises au moment où il se faisait connaître en Europe, soit dans les années 1980. Je trouvais qu’il était bien trop bavard à la guitare, qu’il se contentait un peu trop d’imiter Albert King et que sa voix manquait d’ampleur. Ce n’est pas un réquisitoire mais l’expression de ce que je ressentais alors… Mais Melvin a évolué (et moi aussi, j’espère !), il a vieilli aussi car il a fêté ses 60 ans en mars dernier. Bien sûr, à la guitare, il se laisse encore aller à quelques excès démonstratifs, mais nous savons que les amateurs de blues rock, un genre moins clairement identifié il y a 30 ans que de nos jours, raffolent souvent de ce genre de spectacle… Bref, on ne va pas reprocher à l’artiste de satisfaire son public, d’autant que sa voix a aussi gagné en assurance.

Melvin Taylor est donc né en 1959, à Jackson dans le Mississippi, mais il a suivi ses parents qui se sont installés à Chicago dès 1962. Il a débuté dans le West Side et a commencé à tourner activement en Europe dans la première moitié des années 1980, enregistrant d’ailleurs ses deux premiers albums pour un label français, Isabel. Aujourd’hui, il en totalise neuf, le dernier datant de 2013. On pourra le voir durant deux tournées en France, en ce mois de mai puis en juillet. Voici donc ces dates : il sera le 22 mai à Châtellerault (Vienne) pour le festival Jazzelerault, le 24 à Mantes-la-Jolie (Yvelines) pour le Tracteur Blues Festival, le 25 au Pan Piper à Paris, le 28 à Coutances (Manche) pour Jazz sous les Pommiers, et le 31 à Munster (Haut-Rhin) pour le Munster Jazz Festival. Puis il reviendra le 1erjuillet à Vienne (Isère) pour Jazz à Vienne et le 4 au festival de jazz de Montreux en Suisse, mais des dates pourraient s’ajouter d’ici là. Pour illustrer cela, j’ai évidemment choisi un extrait en public, en 2018 au Méridien à Paris, une reprise très personnelle de Hound Dog Taylor qui s’intitule Sadie.

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© : JM Rock’n’Blues / Soul Bag