Negro spirituals, field hollers, call-and-response, work songs, ces termes nous ramènent aux fondations des musiques afro-américaines dites « populaires ». Ils enfanteront le blues et le gospel, qui seront eux-mêmes à l’origine du R&B, de la soul, du funk, du rock, du disco et aujourd’hui du hip-hop (entre autres !). Une histoire connue me direz-vous, mais nous ne devons jamais oublier combien ces musiques sont étroitement liées à l’esclavage et à la ségrégation. Elles en sont même issues, les formes les plus primitives constituant longtemps le seul moyen d’expression des esclaves, du XVIIe au XIXe siècle… La Caraïbe a également subi de telles ignominies, et l’évolution de ses genres musicaux est somme toute parallèle, même s’il existe bien sûr bon nombre de différences artistiques et stylistiques. Il me semble dès lors essentiel de considérer attentivement la parution récente du livre La fabrique de la race dans la Caraïbe de l’époque moderne à nos jours. Tout est dit ou presque dans le titre de cet ouvrage qui se divise en deux grandes parties : « Les divers champs de la racialisation », qui remonte aux origines de l’esclavage au XVIIe siècle, et « Races et tabous », qui s’arrête davantage sur l’époque moderne. Le sommaire détaillé se consulte à cette adresse. À lire également cet article sur le site de Guadeloupe La 1ère. S’il s’agit pour conclure de faire un parallèle avec notre musique préférée, il importe de rappeler que de 1922 à 1948, les disques de blues faits par des Noirs à l’attention du seul public noir s’appelaient « race records »…
La fabrique de la race dans la Caraïbe de l’époque moderne à nos jours. Ouvrage collectif sous la direction de Marine Cellier, Amina Damerdji et Sylvain Lloret, éditions Classiques Garnier, 258 pages, 19 euros.