Au programme de mon émission sur YouTube, Hayes McMullan (rubrique « Un blues, un jour ») et Andres Roots (rubrique « Nouveauté de la semaine»).
Je m’arrête aujourd’hui sur Hayes McMullan, disparu en mai 1986, il y a 33 ans. Il est impossible de déterminer le jour exact de sa mort de ce bluesman, on sait juste que c’est au mois de mai. Mais je ne souhaite pas occulter des artistes sous le simple prétexte qu’il manque une telle précision biographique, je fais donc pour la première fois dans cette émission une exception. D’autant que l’histoire de McMullan mérite d’être racontée. Car ce chanteur et guitariste, né le 29 janvier 1902 (paradoxalement, on connaît son jour exact de naissance !) dans le Delta près de Tutwiler, a connu Charlie Patton, avec lequel il a même tourné à la fin des années 1920. On lui a ensuite proposé d’enregistrer mais comme on lui proposait seulement 5 dollars par chanson (et évidemment pas de royalties…), il a trouvé que ce n’était pas assez bien payé ! Il donc a préféré se consacrer à l’activité de métayer et à la religion, avant de militer également pour les droits civiques dans les années 1960. À cette époque, il est découvert par le musicologue et historien Gayle Dean Wardlow, qui l’enregistre chez lui en 1967 à Tutwiler, puis en studio à Jackson l’année suivante. Mais les faces ne sortent pas.
En 1998, soit 30 ans après, sur le CD qui accompagne son livre « Chasin’ That Devil Music – Searching for the Blues », Wardlow propose un seul morceau, Looka Here, Woman. Et il faudra attendre encore 20 années supplémentaires, jusqu’au début 2017, pour que le label Light in the Attic publie toutes les plages sur « Everyday Seem Like Murder Here ». Et il s’agit d’un document passionnant comprenant au total 31 plages dont 22 chansons, mais aussi 9 extraits d’interviews, dans lesquels McMullan évoque la vie des bluesmen itinérants, dans les juke joints et autres barrelhouses, les crues du Mississippi, et évidemment Patton. En France, l’album sera même chroniqué dans Télérama… Mais McMullan ignore tout cela car il est donc mort bien avant, en 1986 à 84 ans. Artistiquement, Hayes McMullan est un peu à la croisée des styles. Il s’inspire beaucoup du Delta Blues, mais il a sans doute fait évoluer sa musique au fil des décennies par rapport à ses débuts, car avec sa voix douce et traînante et son répertoire varié, il se rapproche aussi de songsters comme Mance Lipscomb et Mississippi John Hurt, ce qui le rend d’autant plus intéressant. Dans mon émission, on l’écoute d’ailleurs plutôt dans cette veine avec Fast Old Train.
Pour la nouveauté de la semaine, je vous propose une vraie découverte aujourd’hui avec Andres Roots, un personnage qui sort des sentiers battus de cette émission, et qui nous propose un nouvel album chez Roots Art, « Breakfast in September ». En plus, il nous emmène sur des terres carrément inexplorées dans « Les temps du blues » car il vient de Tallinn en Estonie, où il est né en 1976. Et puis, à moins de deux semaines des élections européennes, s’arrêter sur cet artiste est tout à fait de circonstance car il incarne mieux que bien d’autres un blues international et surtout européen. En effet, depuis son premier album en 2010, il a travaillé avec des Britanniques, des Suédois, des Finlandais, des Danois, des Allemands, et même quelques Américains.
Andres Roots ne chante pas et c’est un adepte de la guitare slide sous toutes ses formes. On trouve sur son CD des choses assez classiques d’inspiration hawaiienne comme The Sheik of Hawaii, d’autres plus bluesy comme 4 AM Hot Dog, un peu de gospel avec When the Saints Go Marching In, de jazz avec One for Mezz, mais aussi des chansons franchement inattendues comme le tango Tango Walk ou la valse Waltzin’ Blue. Il s’agit du sixième album d’Andres Roots, il est évidemment instrumental et je conçois qu’il puisse désarçonner les auditeurs de cette émission et les amateurs d’un blues en quelque sorte plus classique. Mais il appartient à notre univers et c’est un interprète qui maîtrise toutes les nuances de la slide. Je vous propose de l’écouter dans mon émission avec le morceau du disque le plus rattaché au blues, qui s’intitule 4 AM Hot Dog.
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