En cette fin d’année, depuis la semaine dernière, je vous propose une rubrique hebdomadaire consacrée aux disques qui ont selon moi marqué l’année 2021. Aujourd’hui, arrêtons-nous sur un revenant si je puis écrire, en la personne de Clarence Spady. Cet excellent chanteur et guitariste est né le 1er juillet 1961 à Paterson dans le New Jersey. Avec un père et un oncle guitaristes de blues, il se met dès l’âge de cinq ans à l’instrument. Durant sa jeunesse, outre le blues, il explore différents styles au sein de groupes de rock, de funk, de soul, de R&B… Il revient plus franchement au blues dans les années 1990 et signe un premier album chez Evidence en 1996, « Nature Of The Beast ». Son deuxième album se fait attendre et sort en 2008 (« Just Between Us » chez Severn). Ces deux disques sont très bien reçus par la critique mais Spady n’en profite pas, et son troisième album, « Surrender », qui est donc mon choix de la semaine, est donc paru cette année chez Nola Blue. Avec sa voix expressive, sont jeu de guitare fluide et mélodieux, et ses textes inspirés, il impose sur ce disque entre blues moderne et soul une patte d’une belle originalité. Pour en savoir plus, comme j’en ai l’habitude dans cette rubrique, j’ajoute ici le texte de ma chronique détaillée parue dans le numéro 243 de Soul Bag :

CLARENCE SPADY
SURRENDER
Disque à plusieurs vitesses ! Les deux morceaux qui l’ouvrent, l’autobiographique (et un peu nostalgique) If my life was a book et Segue/Good conversation, avec son solo de guitare mélodieux signé Adam Schulz, sont résolument soul. Car Spady est doté d’une belle voix expressive, parfaite pour le genre, et jamais prise en défaut sur ce disque aux accents colorés. Car le changement de vitesse dès la troisième plage ne prévient pas, avec un blues lent intense, When my blood runs cold, belle reprise de Lucky Peterson qui est aussi un hommage au bluesman mort l’an dernier. Spady continue de nous toucher avec la chanson suivante, K-Man, dans laquelle il évoque son fils Khalique disparu à seulement 25 ans, mais cette fois avec une guitare déliée et de subtils traits d’harmonica (Tom Martin)… La chanson-titre (Surrender) et le standard Down home blues maintiennent la tension sur un tempo lent, mais l’approche diffère grandement, blues lent d’abord, puis semi-acoustique. Et vroum, les trois derniers titres ont été enregistrés en public au River Street Jazz Cafe. Et quelle bonne idée de passer ainsi du studio au live, sans imposer un disque entier en concert. Du coup, on accepte plus volontiers les longueurs du tour de force instrumental et endiablé Jones Falls Expressway sur lequel tout le monde se lâche (dont Spady avec des envolées guitaristiques qui vont du jazz rock au blues rock), et on se délecte du smooth blues Addiction game et du beau soul blues Pick me up avec ses chœurs et sa guitare élégante et sobre. Chanteur et guitariste impeccable, compositeur inspiré, répertoire original et intelligent, on peut se demander pourquoi Clarence Spady n’a enregistré que deux albums (en 1994 et 2008) avant celui-ci. Mais à 60 ans, il a encore le temps de nous en mettre plein la vue…