Le Congolais Papa Wemba (1949-2016), représentant emblématique de la rumba. © : STR / AFP / RCI.

Encore de la musique caribéenne aujourd’hui sur ce site… Mais qui pour s’en plaindre ? D’autant qu’en la circonstance, cela nous mènera tout droit… au blues ! Je vous propose donc d’évoquer la rumba. Il peut s’agir d’un style musical comme d’une danse. Dans tous les cas, la rumba obéit à une série de rythmes enlevés qui la nimbent de différentes ambiances et couleurs. La forme originelle nous vient de Cuba, et ses origines sont très anciennes car elles nous ramènent au XVIe siècle : elle est en effet introduite par les premiers colons espagnols venus avec des cargaisons d’esclaves africains forcés à travailler sur des plantations de canne à sucre. Un peu comme ce fut le cas pour les formes annonciatrices du blues aux États-Unis, les traditions musicales qui composeront la rumba (évidemment, le terme était alors inconnu) reposent d’abord sur des percussions, des danses et des chants africains. De même, les esclaves étant victimes d’une répression féroce s’il essaient de perpétuer leur culture, elles ne peuvent que s’exprimer clandestinement. Mais dans les régions où les communautés d’esclaves sont les plus importantes, la transmission de génération en génération peut se faire.

Rumba à Cuba. © : National Council for Cultural Heritage.

La rumba ne devient toutefois populaire à Cuba qu’au XIXe siècle, au début duquel elle s’implante progressivement dans les villes, et sa forme moderne naît dans les années 1880, mais elle reste encore très marquée par les caractéristiques issues d’Afrique où cette musique connaît un regain d’intérêt à la même époque. Après l’abolition de l’esclavage à Cuba en 1886, la rumba peut enfin se propager, et dès les années 1920, elle fait partie des genres musicaux à part entière de l’île, même si les premiers enregistrements commerciaux ne seront pas réalisés avant 1947. Désormais, la rumba est une véritable institution à Cuba. D’ailleurs, en 2016, la rumba cubaine a été inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Et si j’en crois cet article publié hier par RFI, lors de sa session annuelle qui s’ouvre ce lundi 13 décembre 2021 à Paris (c’est aussi une des raisons pour laquelle je publie mon propre article aujourd’hui), l’UNESCO devrait également inscrire la rumba congolaise à sa liste ! À suivre… Mais je vous ai promis du blues (pas inscrit à l’UNESCO, grrrr…). En effet, de nombreux bluesmen, et pas des moindres, ont mis à leur répertoire des chansons directement inspirées de la rumba. Je vous propose ci-dessous une sélection de chansons dans cet esprit (tirées de la compilation « Rumba Blues 1940-1953 » sortie chez Rhythm and Blues Records), avec bien sûr les liens YouTube. Eh bien dansez, maintenant !

Professor Longhair. © : Toppermost.

– Thats’ your last boogie par le Johnny Otis Orchestra avec le chanteur Joe Swift (1948).
– Daybreak par Pee Wee Crayton (1951).
– Heartbreaker par Ray Charles (1953), alors seulement âgé de vingt-deux ans…
– Hound dog par Big Mama Thornton (1953). Et oui, cette célébrissime chanson de la grande chanteuse est basée sur le rythme d’une rumba ! Contrairement à ce que mentionne YouTube, Big Mama a bien enregistré cette chanson en 1953, pas en 1952.
– Woke up this morning par B.B. King (1953). Le roi du blues y est donc allé de sa rumba…
– Hey now baby par Professor Longhair (1950). Je termine avec celui que l’on appelait aussi Fess et qui fut un maître du genre, tant son jeu de piano (en particulier ses fameux triplets de la main droite, immédiatement identifiables) doit beaucoup à la rumba.

Liste évidemment non exhaustive…