© : Académie du jazz.

Où s’arrêtera-t-elle ? Désignée artiste de l’année 2022 par votre serviteur sur ce site (ben oui, soyons modestes !, et lire mon article du 26 janvier 2023) pour son merveilleux album « I Ain’t Playin’ » chez Little Village, auquel j’avais attribué la note maximale dans Soul Bag, Diunna Greenleaf a depuis accumulé les récompenses. Toujours dans Soul Bag, la chanteuse de Houston n’est devancée dans le palmarès 2022 que par Charlie Musselwhite avec « Mississippi Son » (Alligator), auteur, il faut le reconnaître, en l’occurrence d’une pure merveille. En décembre dernier (mon article du 20 décembre 2022), l’académie Charles-Cros récompensa Diunna de son coup de cœur blues & soul pour son album.

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Et hier 13 mars 2023, divine surprise (mais en est-ce une ?), au tour de l’académie du jazz de donner son prix Blues au disque de Diunna Greenleaf. Et ce n’est peut-être pas fini… En effet, pour les prochains Blues Music Awards qui rendront leur verdict le 11 mai prochain, la chanteuse est nommée dans trois catégories. Quoi qu’il advienne, cette vocaliste d’exception aura déjà largement mérité ces plébiscites. Mais élargissons le spectre. Le prix Soul Gospel est revenu aux Dedicated Men of Zion pour « The Devil Don’t Like It » (Bible & Tire). Côté jazz, le grand prix a consacré Joshua Redman, Brad Mehldau, Christian McBride et Brian Blade pour « LongGone » (Nonesuch), Leïla Olivesi remportant le prix Django Reinhardt et Samara Joy celui du jazz vocal pour « Linger Awhile » (Verve). Enfin, Steven Jézo-Vannier a reçu le prix du livre de jazz pour son ouvrage Ma Rainey – La mère du blues chez Le mot et le reste, dont j’avais dit le plus grand bien dans le numéro 248 de Soul Bag (ma chronique à lire ci-dessous).

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Ma Rainey – La mère du blues, par Steven Jézo-Vannier, Le mot et le reste, 280 pages, 23 euros.
Quelque deux ans après le film Ma Rainey’s Black Bottom par George C. Wolfe (lire notre numéro 242), la pionnière du blues classique fait donc l’objet d’un livre. Et il s’agit d’une véritable biographie sur la chanteuse, pour laquelle l’auteur a manifestement mené des recherches très approfondies. On apprend notamment bien des choses intéressantes sur la jeunesse et les origines familiales de Ma Rainey, une gageure quand on sait que les sources sur ces époques, qui remontent quasiment à l’esclavage, sont extrêmement rares. Un seul (petit) regret, l’insistance de l’auteur pour attribuer à Ma Rainey « l’invention » du blues en première partie. Mais son livre est une plongée captivante dans le monde d’un blues alors naissant, Ma Rainey étant sans doute l’artiste la plus proche des racines sudistes (elle est née en Géorgie) parmi ses paires plus proches du jazz ou du vaudeville, deux courants urbains. Jézo-Vannier ne néglige rien, l’enfance au sein d’une famille pauvre, la transition des coon songs, les débuts au sein des troupes itinérantes, les race records, ses relations avec Bessie Smith, Thomas A. Dorsey et son producteur Jay Mayo Williams, le racisme, les violences, la ségrégation, enfin le déclin d’une immense chanteuse qui s’éteindra en 1939, alors que le monde pris de folie décide d’entrer en guerre. Très complet, l’ouvrage propose une sélection de repères discographiques portant sur des personnages en rapport avec Ma Rainey et une discographie de ses enregistrements. Une biographie qui comble un manque et rend un juste hommage à une artiste essentielle.

 

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