Avant d’évoquer le groupe de la semaine en vue de la prochaine édition du festival Terre de Blues (du 17 au 20 mai 2024), voici une information importante. En effet, les billets destinés aux résidents, et donc à un tarif préférentiel, sont désormais disponibles et vous pouvez les retirer à l’office de tourisme de Marie-Galante à Grand-Bourg (tél. : 05 90 97 56 51). Vous trouverez plus d’informations sur la page Facebook du festival, plutôt que sur le site officiel, toujours pas à jour et qui n’affiche pas le programme, sauf si on se rend sur la billetterie, mais c’est incomplet car seuls les concerts sur la scène principale de l’habitation Murât sont mentionnés.
Mais venons à un groupe guadeloupéen que personnellement j’adore, et qui se produira le 17 mai dans le cadre d’un léwoz à Grand-Bourg, Kan’Nida. J’ai du mal à imaginer une meilleure incarnation de la musique traditionnelle guadeloupéenne que Kan’Nida. Son histoire est étroitement liée à celle de la famille Geoffroy et des Grands Fonds, une région vallonnée du sud-ouest de la Grande-Terre. Une terre aux reliefs marqués et escarpés, une terre de résistance, inhospitalière, où les colons n’étaient pas à la fête. En cela, elle n’est pas sans rappeler les bayous de Louisiane, où les esclaves et les Amérindiens trouvaient refuge ensemble. Une terre rurale enfin, propice à l’émergence de cultures musicales raciniennes. En Louisiane, c’est la musique cajun basée sur un créole francophone. En Guadeloupe, c’est le gwo ka, qui propage l’écho de la percussion africaine.
Comme le blues dans la région dite du Delta dans le Mississippi, le gwo ka naît de la campagne. Seul la nature de l’agriculture change, le coton d’un côté, la canne à sucre de l’autre. Si ses origines remontent à l’esclavage, il n’est vraiment « sorti » de sa campagne qu’avec l’avènement des maîtres tambouyés des années 1950 et surtout 1960, dont Marcel Lollia dit « Vélo », Guy Konkèt et Robert Loyson (mon article du 30 août 2022), pour ne citer que les plus illustres. Arrivé un peu après, il y a désormais une bonne quarantaine d’années, Kan’Nida fait partie de leurs héritiers directs. Aujourd’hui, ils entretiennent et transmettent une tradition musicale populaire, mais ils préservent surtout une culture ancestrale.
Bien entendu, au fil du temps, les membres du groupe ont changé, mais la ferveur poussée par le poids de l’histoire agit comme une force sans cesse renouvelée. Depuis son premier disque en 1984, il y a donc tout juste quarante ans, « Léwoz la ? » chez LM Production, Kan’Nida n’a signé qu’une demi-douzaine d’albums. Mais il s’agit surtout d’un groupe de scène, chez lequel il y a autant à voir, et peut-être même plus, qu’à écouter. Car cette musique résonne et vibre aussi comme un appel, à participer, à communiquer, à communier. Car elle repose sur le call-and-response (mon article du 1er janvier 2022), cet appel-réponse impérieux que le gwo ka en Guadeloupe partage avec les musiques afro-américaines, issu des chants de travail (works songs) annonciateurs des spirituals, du blues, du gospel. Kan’Nida est un des plus forts traits d’union entre musiques antillaises et afro-américaines.
Voici maintenant ma sélection de chansons en écoute.
– Tijo en 1986.
– Dix-sept ans en 1992.
– Mango en 1996.
– Kyenzenn en 2000.
– Nou ka travay en 2010.
– Kakika 2013.
– Chant de travail 2016.
– Léwoz à Sainte-Anne 2023.
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