Nous avions prévu dans cette rubrique de revenir sur Abel Zénon à l’occasion du premier anniversaire de son décès survenu le 1er septembre 2022. Mais l’actualité de ces derniers jours est décidément bien triste avec deux nouvelles disparitions, celles de José Sébéloué, membre fondateur de la Compagnie créole, le 3 septembre, puis de Gérard Lockel, grand joueur de gwoka, quatre jours plus tard. Concernant Abel Zénon, qui aura vécu quatre-vingt-dix-huit ans, il se fit connaître comme guitariste et surtout comme saxophoniste, notamment dans le domaine de la biguine. Dans les années 1960, 1970 et 1980, ce natif de Morne-à-l’Eau a enregistré de nombreux singles et plusieurs albums sous son nom.
Né le 17 septembre 1948 à Ouanary en Guyane, José Sébéloué apprend le tambour, notamment sous l’influence de Gisèle Sérotte alias Man Serotte, puis la guitare. En 1968, il travaille avec le groupe les Vautours et sort un single intitulé « José Sébéloué chante avec les Vautours » (Verite/ Ti Bolom a Present), puis fonde deux ans plus tard le groupe Pop-Corn. Il jouit d’une belle popularité localement mais décide toutefois d’aller tenter sa chance en France hexagonale, où il forme en 1975 la Compagnie créole avec quatre autres artistes, deux Guadeloupéens et deux Martiniquais. Inspirée à la base par les traditions musicales caribéennes (zouk, kadans, calypso…), leur musique va toutefois rapidement relever davantage de la variété, ce qui leur vaudra de gros hits dans les années 1980, dont C’est bon pour le moral et Le bal masqué. Avec une vingtaine d’albums à son actif, la formation, au sein de laquelle José Sébéloué chante, joue de la guitare et des percussions, aura marqué notre époque dans son registre. Elle poursuivait d’ailleurs ses activités quand José Sébéloué s’est donc éteint le 3 septembre 2023, deux semaines avant son soixante-quinzième anniversaire.
Gérard Lockel voit le jour en avril 1928 à Sainte-Marie de Capesterre-Belle-Eau. Son oncle n’est autre que le grand trompettiste de jazz Abel Beauregard. Vers l’âge de douze ans, Lockel découvre le gwo ka puis peu après la guitare. Il va donc dédier son existence à la musique, mais aussi s’engager concrètement pour la reconnaissance de son art et plus particulièrement pour les traditions musicales de son archipel. En effet, au retour de quelques années passées à écumer les océans dans les fifties, il constate que la tradition du gwo ka est mal structurée. Il va donc la moderniser en intégrant d’autres instruments dont la guitare et les cuivres, et créer le 11 décembre 1969 un mouvement appelé « Gwo ka modèn ». Dans son sillage, les plus illustres joueurs de gwo ka (Marcel Lollia dit « Vélo », Guy Konquet, Robert Loyson…) vont profiter de son approche audacieuse et de ses méthodes. Outre des disques, il a publié en 1981 l’ouvrage de référence Traité de gwo-ka modèn, plusieurs fois réédité. Avec le décès de Gérard Lockel ce 7 septembre 2023 à l’âge de quatre-vingt-quinze ans, la Guadeloupe a perdu un artiste essentiel et irremplaçable.
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