Les temps du gospel copie

Au programme de mon émission sur YouTube, Bo Diddley (rubrique « Un blues, un jour »), né le 30 décembre 1928, et Blind Joe Taggart (rubrique « Les temps du gospel »).

Il est sans doute vain de présenter Bo Diddley tant son influence s’étendait bien au-delà de la sphère blues. Authentique concepteur d’un rythme irrésistible que l’on nommera à très juste titre le Diddley Beat, il voit donc le jour le 30 décembre 1928 à McComb, une petite ville du sud du Mississippi proche de la frontière louisianaise. Le début de sa biographie n’est pas simple à retracer. Il est en effet né Ellas Otha Bates, mais, adopté par une cousine de sa mère, Gussie McDaniel, il est bien plus connu sous le nom d’Ellas McDaniel. Quant à son pseudonyme Bo Diddley, si son origine est mal définie, il ne provient certainement pas du diddley bow, cet instrument archaïque à une corde. Ce serait plutôt en relation avec une personne de son entourage, peut-être un musicien de rues non professionnel qu’il aurait côtoyé dans sa jeunesse (une version privilégiée par l’artiste), ou bien un boxeur (un sport pratiqué par McDaniel), voire un surnom choisi par Leonard Chess…

D’autant que Bo Diddley, installé avec sa famille à Chicago dès 1934, a débuté au trombone et au violon, avant de choisir la guitare qui correspondait mieux à son tempérament déjà fougueux. Bien entendu, après avoir joué dans les clubs et les rues de Chicago (avec le percussionniste Jerome Green qui deviendra un pilier de sa formation, mais aussi Earl Hooker), Bo Diddley va graver à partir du milieu des années 1950 pour les frères Chess des titres qui deviendront des standards populaires (sur lesquels il faut aussi souligner le rôle du superbe harmoniciste Billy Boy Arnold). Avec son style inimitable et sa musique énergique et hautement personnelle (elle se base sur des rythmes africains mais également afro-caribéens), il va s’ériger en pivot entre blues, R&B et bien sûr rock.

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Et des chansons intemporelles comme Bo Diddley, I’m a Man, Pretty Thing, Who Do You Love, Road Runner ou encore You Can’t Judge a Book By the Cover vont lui permettre de passer à la postérité. Avec sa musique directe et répétitive mais très excitante, il aura suivi un parcours qui n’est pas sans rappeler John Lee Hooker (dont il reconnut l’influence), mais c’est bien le seul artiste auquel on peut le comparer. Grâce en outre à des prestations scéniques incendiaires alors que tout son jeu de guitare est basé sur la rythmique, car Bo Diddley n’a sans doute jamais pris un solo de sa vie, sa popularité ne diminuera pas jusqu’à sa mort, le 2 juin 2008 (et non pas 2007 comme je l’annonce dans mon émission, toutes mes excuses…) à l’âge de 79 ans. J’ai programmé dans mon émission la version originale de You Can’t Judge a Book By the Cover, qui date de 1962.

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Auteur d’un grand nombre d’albums, Bo Diddley a vu en outre son œuvre multi-rééditée sous toutes les formes, et sa discographie est un casse-tête si on veut éviter les doublons. Pour faire simple, je vous suggère les deux anthologies Frémeaux & Associés qui offrent sans doute aujourd’hui la meilleure introduction à son œuvre fondamentale (en 6 CD) : « The Indispensable 1950-1955 » (2012) et « The Indispensable Volume 2 – 1959-1962 » (2013).

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En deuxième partie d’émission, pour ma dernière page gospel de l’année 2018, j’ai choisi un pionnier et un des meilleurs représentant du sacred blues, Blind Joe Taggart. Né le 16 août 1892 à Abbeville en Caroline du Sud, il a également vécu en Géorgie avant de déménager à Chicago au tout début des années. Un parcours qui en fait plutôt un adepte à la guitare du blues de la Côte Est, même si son jeu se démarquait par une rudesse moins répandue chez ses pairs originaires de la même région. C’était en outre un superbe chanteur à la voix rauque très puissante. On pense forcément à Blind Willie Johnson dont il se distinguait pourtant à bien des points de vue, d’autant qu’il n’était pas un spécialiste de la guitare slide. Et puis, surtout, contrairement au Texan dont les textes furent exclusivement religieux, Taggart n’hésita pas à enregistrer de véritables blues pour différents labels, usant pour cela d’une demi-douzaine de pseudonymes ! Taggart avait d’ailleurs la réputation d’être un homme sans scrupules et violent : Josh White, que Taggart engagea comme guide d’aveugle, l’accusa d’être tyrannique et surtout pas si aveugle que ça ! Quoi qu’il en soit, Taggart, mort le 15 janvier 1961 à 68 ans, nous laisse une œuvre importante dans l’histoire du sacred blues ou gospel blues, que personnellement j’apprécie beaucoup, enregistrée entre 1926 et 1934, parfois avec sa femme Bertha. Pour mon émission, j’ai choisi un titre issu de sa dernière séance en 1934, avec justement sa femme, qui s’appelle When I Stand Before the King.

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Le label autrichien Document a réédité l’intégrale de ses enregistrements sur deux compilations : « Complete Recorded Works In Chronological Order, Volume 1 – 1926-1928 » et « Complete Recorded Works In Chronological Order, Volume 2 — 1929-1934, Plus Blind Gussie Nesbit 1930-1935 & Rev. Edward W. Clayborn’s Complete 1929 Recordings + 1 Alt. Take 1927 ».

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