Au programme de mon émission sur YouTube, Bessie Smith (rubrique « Un blues, un jour »), et Tiny Legs Tim (rubrique « Top of blues »).
Ce fut très facile de trouver une artiste aujourd’hui pour cette émission. Une artiste car c’est Bessie Smith, née le 15 avril 1894, la première grande chanteuse de l’histoire du blues, et qui reste parmi les plus influentes alors que ses principaux succès ont maintenant près d’un siècle. On est là encore en compagnie d’une artiste appartenant à un club très fermé et composé d’artistes majeurs parfaitement connus de tout amateur… On rappellera toutefois que Bessie vient de Chattanooga dans le Tennessee et que ses parents étaient morts avant ses 10 ans. Elle était donc encore enfant quand elle a débuté en chantant et en dansant dans les rues avec son frère aîné guitariste. Puis elle a pris part à des troupes itinérantes, dont une en 1912 qui comprenait Ma Rainey, ce qui l’empêcha dans un premier temps de s’imposer comme vocaliste. Mais après tout, elle n’avait que 18 ans…
D’ailleurs, grâce à sa voix très puissante mais porteuse d’une forte émotion, ainsi qu’à sa présence, elle est ensuite engagée dans des théâtres du Sud et de la Côte Est. Sa réputation grandit et elle n’a pas de mal à être repérée par un gros label, en l’occurrence Columbia, qui l’enregistre à partir de 1923. D’ailleurs, elle n’enregistrera que pour Columbia… Le succès est immédiat et se poursuit durant toutes les années 1920, faisant de Bessie Smith l’impératrice du blues, et la plus grande vocaliste de son temps, mais on peut étendre son influence aux chanteuses de jazz. D’autant que Bessie s’entoure surtout de jazzmen, comme le veut toute la période du blues dit classique dans les années 1920. Elle devient une énorme star, la Noire la mieux payée de son époque dans le domaine du spectacle, s’entourant sur scène de véritables revues, voyageant en train dans une voiture privée luxueusement aménagée…
Outre ses talents artistiques évidents, Bessie Smith s’impose aussi par sa personnalité, c’est une femme émancipée qui s’assume, aux mœurs très libres, connue pour ses frasques et sa bissexualité, des thèmes qu’elle n’hésite pas à développer dans ses chansons. Certes, comme tous les acteurs de l’industrie musicale, elle subit la crise de 1929, mais elle enregistre jusqu’en 1931, même si ces disques sont plus espacés, et ne cesse pas de se produire. En 1933, elle retrouve d’ailleurs les studios pour graver de nouvelles faces pour OKeh, une marque que possède Columbia. On croit sa carrière relancée, dans le blues ou peut-être le jazz car elle a tout à fait les capacités de séduire dans ce domaine. Mais le 26 septembre 1937, elle est très grièvement blessée dans un accident de la route et décède peu après son arrivée à l’hôpital de Clarksdale, à l’âge de 43 ans. Toute sa discographie est disponible sous toutes les formes, mais le plus simple est peut-être de se procurer son intégrale en 10 CD « The Complete Columbia Recordings » (Sony, 2012). Pour mon émission, j’ai choisi sa version de 1929 du fameux St. Louis Blues, mais elle n’est pas tirée comme je l’annonce à l’antenne du film du même nom, un problème technique m’a obligé à changer au dernier moment, ce dont je m’excuse…
Pour ce « Top of Blues », c’est désormais une habitude bien en place, arrêtons-nous sur les classements mensuels du CRB, le Collectif des radios blues qui compte une cinquantaine de stations. Il y a d’abord l’Airplay, avec les albums les plus diffusés dans ses émissions. Pour mars 2019, le podium se compose de Manu Lanvin pour « Grand Casino » (Verychords), d’Awek pour « Let’s Party Down » (autoproduction) et de Tommy Castro pour « Killin’ It Live » (Alligator). Quant au Powerblues, qui porte sur les albums préférés des animateurs, on retrouve cette fois à la première place Awek, Tiny Legs Tim pour « Elsewhere Bound » (Sing My Title) et John Mayall pour « Nobody Told Me » (Forty Below). Bien, la présence persistante de Manu Lanvin en haut de classements blues me laissera toujours perplexe (indépendamment de la qualité artistique de sa musique), je consacrerai bientôt ma nouveauté de la semaine à Awek, et j’ai récemment consacré des émissions à Tommy Castro et John Mayall.
Il ne reste donc que Tiny Legs Tim, chanteur et multi-instrumentiste belge qui œuvre du côté de Gand, une ville en région flamande et donc néerlandophone, et évoquer son album n’est absolument pas une punition. Cet artiste influencé par le blues traditionnel est l’auteur depuis 2010 de quelques EP et d’une demi-douzaine d’albums, dont le dernier, « Elsewhere Bound », vient donc de sortir sur son propre label Sing My Title. J’avoue mal connaître la discographie de Tiny Legs Tim, de son vrai nom Tim De Graeve, mais son dernier CD m’a agréablement surpris. Sa musique s’éloigne certes par moments du blues mais il ne s’égare jamais et on perçoit toujours l’inspiration, c’est bien chanté, bien joué – Tim aime bien la slide –, bien arrangé et étoffé de cuivres. On retrouve ces caractéristiques sur l’extrait que j’ai retenu dans mon émission, intitulé Don’t Be Sorry.
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