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Ce remarquable chanteur et guitariste de la Côte Est, qui enregistra de nombreuses faces à partir de 1928 et tint un rôle de pionnier, n’a pas eu la reconnaissance qu’il mérite. Une seule photo de cet artiste, de mauvaise qualité, nous est parvenue… Nombre de ses disques furent réalisés sous divers pseudonymes, au sein de formations ou comme accompagnateur d’autres artistes, ce qui ne contribua pas à le mettre en lumière. Profitons du 117eanniversaire de sa naissance pour retracer son parcours. Il naît Curley James Weaver le 25 mars 1906 à Covington, Géorgie, et grandit à proximité dans une exploitation de coton, à Porterdale. Sa mère, Savannah « Dip » Shepard Weaver, musicienne émérite (guitare et piano), lui enseigne le chant et la guitare à dix ans, ainsi qu’à Robert et Charlie Hicks (les futurs Barbecue Bob et Charley Lincoln), qui deviendront également des bluesmen renommés.

 

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Weaver complète son bagage en apprenant la guitare slide avec Nehemiah Smith et Blind Buddy Keith, bluesmen réputés dans leur communauté qui n’eurent toutefois pas l’opportunité d’enregistrer. En 1925, Weaver, dont le jeu de guitare impressionne ses pairs, se rend à Atlanta avec l’harmoniciste Eddie Mapp. Ils y retrouvent Barbecue Bob et Charley Lincoln, avec lesquels ils se produisent dans les rues de la capitale de la Géorgie. Le 26 mai 1928, Curley Weaver grave ses deux premières faces pour Columbia, Sweet Petunia et No no blues. Sept mois plus tard, le 26 mai 1929, il en signe deux autres pour QRS, dont une avec Eddie Mapp (It’s the best stuff yet), à une époque où les duos guitare-harmonica sont rarissimes, surtout dans le Piedmont Blues.

Curley Weaver et Fred McMullen croqués par Robert Crumb. © : Stefan Wirz.

La suite de la discographie de Curley Weaver est plus difficile à suivre. Il apparaît en 1930 au sein des Georgia Cotton Pickers avec l’harmoniciste Buddy Moss et Robert Hicks, des Georgia Browns, sous les pseudonymes de Georgia Bill, Jim Miller, Slim Gordon, aux côtés de Mary (Ruth) Willis, Clarence Moore, Fred McMullen, Buddy Moss… En septembre 1933, il s’associe au grand Blind Willie McTell (avec lequel il enregistre dès 1931 sous le pseudo de Georgia Bill), tout en sortant des disques sous son nom jusqu’en 1935. Comme bien des bluesmen de cette époque, il disparaît ensuite des radars, et revient en 1949 pour d’autres disques toujours avec Blind Willie McTell, avec lequel il réalise l’année suivante ses derniers morceaux. Virtuose de la guitare, cité comme l’égal d’un McTell, Weaver aurait peut-être pu relancer sa carrière dans les années 1950, durant lesquelles il continue de se produire. Hélas, sa vue ne cesse de décliner, il perd la vue d’un œil, devient aveugle en 1959 et décède le 20 septembre 1962 d’urémie, à seulement cinquante-six ans. L’œuvre de Curley Weaver, surnommé « Georgia Guitar Legend » (légende de la guitare en Géorgie), doit assurément être nouvellement appréhendée.

Publicité pour le label Perfect. En haut : Spark Plug Smith, Weaver and McMullen, Curley Weaver et Ruth Willis. En bas : Buddy Moss, Coot Grant et Sox Wilson, Fred McMullen et Josh White. © : Big Road Blues.

Écoutons donc sans tarder quelques chansons de ce bel artiste.
Sweet Petunia (et non Patunia comme le mentionne YouTube) en 1928.
No no blues en 1929, version avec Eddie Mapp.
She’s coming back some cold rainy day en 1930 avec les Georgia Cotton Pickers.
Some cold rainy day en 1931 avec Ruth Willis et Fred McMullen.
It must have been her en 1933 avec The Georgia Browns.
Tricks ain’t walking no more en 1935 avec Blind Willie McTell.
Ticket agent en 1949.
No no blues sur la platine d’un Robert Crumb qui a du mal à cacher son émotion, en France depuis sa collection impressionnante de 78-tours.