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Au programme de mon émission sur YouTube, Harrison Kennedy, (rubrique « Un blues, un jour »), et le Mike Greene Band (rubrique « Nouveauté de la semaine »).

Le thème de l’émission du jour se rattache à un événement de l’histoire américaine survenu le 16 janvier 1865, il y a 154 ans. Ce jour-là, le général William Tecumseh Sherman (1820-1891), qui commande en quelque sorte les forces armées nordistes au Mississippi durant la guerre de Sécession, publie les Sherman’s Field Orders n° 15, des ordres militaires qui prévoient la restitution aux esclaves libres de terres sur la côte Atlantique, soit en Caroline du Sud, en Géorgie et en Floride. Pourtant, avant le conflit, Sherman n’appartenait pas ouvertement au camp des abolitionnistes : il considérait que la race noire était inférieure et refusait l’intégration des Noirs au sein de ses troupes, mais il s’opposait à la séparation des familles d’esclaves tout en étant partisan de leur donner accès à l’éducation. En tout cas, sa promulgation de ces fameux Field Orders n° 15 n’est évidemment pas anodine et concerne 18 000 familles d’anciens esclaves et des réfugiés noirs vivant dans la région. Il est prévu de diviser les 1 600 km2 de terres disponibles en parcelles de 40 ares, soit l’équivalent de 16 hectares. Malheureusement, ces ordres furent quasiment sans effet, car le président Andrew Johnson, successeur d’Abraham Lincoln à la Maison Blanche, s’empressera d’y mettre fin quelques mois après leur publication…

En outre, dès la fin de la guerre de Sécession, l’instauration en 1865 et 1866 des tristement célèbres Black Codes (Codes noirs) établira progressivement dans les États du Sud la ségrégation, qui ne fera que remplacer l’esclavage ! Toutefois, les Field Orders n° 15 du 16 janvier 1865 donneront naissance à une célèbre expression qui deviendra symbolique des droits des Afro-Américains, 40 acres and a mule, soit 16 hectares et une mule, même si les ordres initiaux de Sherman ne prévoyaient pas de mule… Les origines de la formule datent de la période dite de la Recontruction (1865-1877), mais elle demeure présente dans bien des esprits de nos jours. Ainsi, par exemple, le réalisateur Spike Lee appellera sa société de production 40 Acres and a Mule.

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. © : Bear Family.

Et côté blues, le canadien Harrison Kennedy, ardent défenseur de la cause afro-américaine, a enregistré une chanson à ce propos en 2005, sur son album « Voice + Story » sorti chez Black & Tan. Je l’ai bien entendu choisie pour mon émission, et elle se nomme précisément 40 Acres and a Mule.

 

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Ma rubrique « Blues in France » ne mérite que très partiellement son nom aujourd’hui, elle a plutôt un fort goût cosmopolite. Je souhaite en effet évoquer le Mike Greene Band, qui a sorti l’automne dernier pour le label Stormy Monday un album live en public intitulé « Same Old Blues Live ». Mais si Mike est effectivement d’origine américaine car il est né à New York, il vit en France depuis pratiquement 45 ans, on peut donc considérer qu’il est « bien de chez nous »… Il a de multiples influences qui lui permettent de pratiquer le blues sous des formes variées, même les plus modernes, sans jamais sacrifier les traditions auxquelles il reste très attaché. Il chante, compose et joue de plusieurs instruments, il est ainsi à l’aise à la guitare, au banjo, à la mandoline et même à l’accordéon, même s’il privilégie aujourd’hui davantage la guitare, j’aime notamment beaucoup ce qu’il fait à la slide. Sa belle carrière est ponctuée d’excellentes collaborations dont Bulldog Gravy, Youssef Remadna, Tomek Dziano, Alain Michel, et j’en oublie forcément !

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© : Facebook.

Et pour l’album dont il est ici question, il a pris la route de l’Allemagne, où il a enregistré dans un club à Binz au bord de la mer Baltique, avec des musiciens cette fois allemands : Marin Scheffler à la guitare, Marko Jovanovic à l’harmonica, Bern Kuchenbecker à la contrebasse et Micha Maass à la batterie. Le disque est varié avec des reprises rappelant la tradition (Jimmy Reed, Roosevelt Sykes, Howlin’ Wolf, Junior Parker, Roosevelt Sykes), d’autres plus le R&B (les Coasters, Ray Charles, Rufus Thomas), sans oublier quelques compositions signées de Mike Greene lui-même. Au bilan, un disque très réussi et décontracté, toujours dans l’esprit, qui démontre qu’il n’est pas utile de se lancer sur des voies hasardeuses pour faire ce « bon vieux blues », bien sûr ! Donc bravo et bon vent à Mike Greene et son band pour de nouvelles aventures. Dans mon émission, j’ai programmé le morceau qui donne son titre à l’album, une composition de Mike, Same Old Blues.

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© : jpc.de