Au programme de mon émission sur YouTube, Jimmy Yancey (rubrique « Un blues, un jour ») et Jean-Yves Astier (rubrique « Blues in France »).
Je suis particulièrement heureux d’évoquer l’immense pianiste Jimmy Yancey, certainement né le 20 février 1901, il y a donc 118 ans aujourd’hui, pionnier essentiel du boogie-woogie, dont il pourrait bien être le père fondateur, et superbe styliste de l’instrument. Il est originaire de Chicago où il vit le jour un 20 février, mais son année de naissance varie énormément selon les sources, qui citent également 1894, 1895, 1898, 1900 ou 1903 ! En fonction des éléments les plus récents à notre disposition, l’année 1901 semble toutefois la plus probable. Issu d’une famille musicale dans laquelle son frère aîné Alonzo est également pianiste, et son père chanteur et guitariste, il connaît rapidement la vie itinérante des musiciens au début du siècle dernier. Au début, il prend toutefois part aux spectacles de son père et de son frère en tant que chanteur et danseur de claquettes, même s’il apprend le piano vers ses 15 ans. L’expérience est d’autant plus enrichissante que ses tournées ne le conduisent pas seulement aux États-Unis mais aussi en Europe, où il va se produire en Grande-Bretagne à Buckingham devant le roi George V !
Après la Première Guerre mondiale, il retrouve néanmoins Chicago, où il se marie avec Estella Harris, qui l’accompagnera plus tard sous le nom de Mama Yancey. Il pratique aussi le baseball à un excellent niveau, il ne quittera d’ailleurs pas complètement le milieu en étant jardinier chargé de l’entretien et du gardiennage des terrains. Mais parallèlement, il se consacre de plus en plus à la musique, et il commence à se produire régulièrement dans les clubs de la ville. Ses différentes activités le privent d’enregistrer avant 1939, soit après d’autres pionniers célèbres du boogie-woogie comme Clarence « Pinetop Smith », Albert Ammons et Meade Lux Lewis, présents sur disque bien avant lui. Mais comme Yancey était plus âgé qu’eux, on peut légitimement penser qu’il les a influencés, raison pour laquelle j’écris plus haut qu’il pourrait être le père fondateur du boogie-woogie, justement popularisé à cette époque, à la fin des années 1930. En outre, il avait un jeu assez personnel et bluesy qui le démarquait de ses pairs, dans lequel il accentuait les basses, mais aussi subtil et presque « doux ».
Jimmy Yancey va enregistrer durant toutes les années 1940, seul ou avec sa femme, mais il est mort plutôt jeune, le 17 septembre 1951 à 50 ans. Outre ses singles, il compte deux albums, un de 6 titres pour RCA Victor en 1940 (« Boogie Woogie ») et un autre de 8 titres en 1951 pour Atlantic (« Pianos Solos »), ce dernier toutefois sorti après sa mort en 1952. Ces deux disques sont des pièces de collection très difficiles à trouver (et très coûteuses !), et l’essentiel de sa discographie est heureusement bien plus facilement disponible sur la série en trois volumes « Complete Recorded Works In Chronological Order » du label Document. Pour mon émission, je n’ai pas retenu un boogie-woogie endiablé mais un blues lent interprété en 1951 avec sa femme, qui démontre toute la finesse et le toucher de Jimmy Yancey, le fameux et somptueux How Long Blues.
En deuxième partie, pour la rubrique « Blues in France », j’ouvre en quelque sorte une nouvelle page car je souhaite désormais donner plus de place à la scène locale en deuxième partie d’émission. Cela pourra d’ailleurs aussi s’étendre aux rubriques du vendredi et du samedi « En tournée » et « Sur scène » si l’actualité s’y prête… Pour ce qui me concerne, une scène géographiquement lointaine pour les Français de métropole car je vis sur l’île de Marie-Galante en Guadeloupe. Mais une scène vivante et intéressante ! Pour inaugurer cet élargissement de la rubrique, je vous propose d’évoquer Jean-Yves Astier, lui aussi résident marie-galantais. Et Jean-Yves n’est ni un débutant ni un inconnu. On retrouve ainsi sa trace comme membre fondateur en 1974 du célèbre groupe Ganafoul, dont le « boogie-rock-blues » dévastateur fut particulièrement populaire dans la deuxième moitié des années 1970 et au début des années 1980. Jean-Yves était le bassiste du groupe mais c’est un artiste accompli et complet qui joue aussi de la guitare, de l’harmonica, qui chante et qui compose. Après la séparation de Ganafoul, il a poursuivi sa carrière tout en se consacrant toujours davantage au blues, souvent avec des textes en français fort bien troussés et parfaitement dans l’esprit.
Il s’est notamment produit et a enregistré avec sa formation Série Limitée deux albums, « Jean-Yves Astier & Série Limitée » (Dixiefrog, 1988) et « Rose Blues » (Milk Shake Records, 1994). Plus récemment, il a fondé le Jean-Yves Astier Trio, dans lequel son fils Elie officie à la batterie, la relève est donc assurée ! Mais Jean-Yves reste très actif, et depuis qu’il vit à Marie-Galante, soit environ quatre ans, il ne doit quasiment jamais passer une semaine sans qu’il se produise quelque part sur l’île. Ce sera sans doute d’ailleurs le cas ce samedi 23 février au Dantana Café à Capesterre, où une soirée blues est au programme avec le Magic Blues Quartet (Éric Choukroun, Gérald Bon, François Denyse et Phil Zetwang). Enfin, selon mes informations, il travaille actuellement à l’écriture de chansons en vue d’un nouvel album… Mais j’aurai donc l’occasion de revenir plus longuement sur son parcours, sur celui des autres musiciens de l’île et de la Guadeloupe, et sur tous ces lieux qui favorisent ici le développement et la préservation des traditions musicales qui nous passionnent. En attendant, en illustration musicale, j’ai choisi dans mon émission Rose Blues, un morceau de Jean-Yves Astier enregistré en public en 2015 à la fête de la musique à Lalbenque dans le Lot, avec son trio et son fils Elie, alors âgé d’une petite quinzaine d’années, à la batterie…
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