Top of blues copie

Au programme de mon émission sur YouTube, Guy Davis (rubrique « Un blues, un jour »), et Dom Flemons (rubrique « Top of blues »).

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© : Amazon

Le 11 mars 1959 marque en quelque sorte une triple première. C’est d’abord la première représentation à Broadway de la pièce de théâtre A Raisin in the Sun. On la doit à Lorraine Hansberry, ce qui en fait également la première pièce écrite par une Afro-Américaine présentée à Broadway. Enfin, Lloyd Richards, qui assure la mise en scène, est lui aussi afro-américain, ce qui est encore une première à Brodaway… La pièce raconte l’histoire d’une famille afro-américaine dans le South Side de Chicago. En récupérant 10 000 dollars de l’assurance-vie d’un parent décédé, la famille va se diviser. La pièce aura beaucoup de succès et sera plébiscitée par le public et la critique.

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Ruby Dee et Sydney Poitier en 1959, lors d’une représentation de la pièce à Broadway. © : Friedman-Abeles Studio / The New York Public Library, Billy Rose Theatre Division.

Elle fera l’objet d’adaptations cinématographiques et de reprises, dont une au théâtre en 2014 avec Denzel Washington. Le grand acteur Sidney Poitier joue le premier rôle dans la pièce comme dans le film qui en sera tiré en 1961. Mais le casting compte également deux acteurs qui ont un rapport direct avec un bluesman que nous connaissons bien. Il s’agit de Ruby Dee, qui apparaît dès la première de la pièce à Broadway et dans le film, et de son mari Ossie Davis, qui remplacera Sidney Poitier dans le rôle principal après quelques représentations de la pièce. Or, Ruby Dee et Ossie Davis ne sont autres que les parents de Guy Davis, chanteur et multi-instrumentiste spécialisé dans le blues traditionnel. Avec sa grosse voix rauque, son banjo, sa guitare ou son harmonica selon son inspiration, Guy Davis est un excellent représentant du genre, et lui aussi est acteur de théâtre, de cinéma et de télévision.

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Ossie Davis et Claudia McNeil en couverture de Playbill, septembre 1959. © : filmfetish

Il a fait plusieurs albums qui vont du bon au génial, souvent caractérisés par des textes de grande qualité, humoristiques et à double sens, d’autant que Davis est très attaché à l’histoire de sa musique et de sa communauté, car il se trouve que ses parents furent aussi des activistes des droits civiques. Au sein de sa discographie, plusieurs albums m’ont marqué : « Butt Naked Free » (Red House, 2000), « Chocolate to the Bone » (Red House, 2003), « Skunkmello » (Red House, 2006), « The Adventures of Fishy Waters: In Bed With the Blues » (Smokeydoke, 2012) et « Juba Dance » (avec Fabrizio Poggi, Dixiefrog, 2013). Mais cet artiste n’a rien fait de négligeable… J’ai choisi pour mon émission un extrait de son formidable album « Skunkmello ». C’est un morceau dans un contexte assez inhabituel pour lui qui s’exprime souvent seul et en acoustique : il figure cette fois avec un groupe au complet, c’est superbe, y compris les paroles, et ça s’appelle It Takes Love to Make a Home.

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© : Discogs

 

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© : Blues Foundation / Soul Bag

Nous sommes lundi l’heure de la rubrique « Top of Blues » est devenue. La Blues Foundation a publié le mois dernier la liste des nominés des Blues Music Awards qui seront remis le 9 mai prochain à Memphis. Comme il y a 26 catégories, je consacre plusieurs émissions aux nominés, j’avais commencé le 21 janvier avec l’album de l’année… Aujourd’hui, arrêtons-nous sur l’album acoustique de l’année, les nominés étant « A Woman’s Soul » de Rory Block, « Presents Black Cowboys » de Dom Flemons, « Global Griot » d’Eric Bibb, « Journeys To The Heart of the Blues » du trio Joe Louis Walker/Bruce Katz/Giles Robson et « Wish The World Away » de Ben Rice. J’ai choisi Dom Flemons, l’ancien chanteur et multi-intrumentiste des Carolina Chocolate Drops qui mène aujourd’hui une belle carrière sous son nom. Il aime depuis toujours les traditions et propose donc ici celle des black cowboys.

Car oui, il exista à partir de la seconde moitié du XIXe siècle (et cela se prolongera au début du suivant), au moment du fameux mythe du Far West, des cowboys noirs. Ils partageaient avec les Blancs issus des classes les plus pauvres des traditions musicales variées tirées des chants de cowboys bien sûr, mais aussi des airs de danse, des string bands, des spectacles itinérants… Et malgré les clivages dont la ségrégation, ils vont inspirer de façon plus ou moins marquée des genres comme le folk, la country et bien sûr le blues. Cette phase de l’histoire afro-américaine est peu documentée, il faut donc se féliciter que Flemons permette de la découvrir, d’autant qu’il le fait avec talent et variété, et que le CD « Presents Black Cowboys » (Smithsonian Folkways Recordings) s’accompagne d’un livret explicatif de 40 pages très instructif. On va l’écouter avec un morceau amusant dans lequel il fait aussi allusion à Railroad Bill que j’évoquais récemment dans mon émission du 7 mars dernier. Ça s’appelle One Dollar Bill.