Nouveauté semaine copie

Au programme de mon émission sur YouTube, Floyd Jones (rubrique « Un blues, un jour »), et Benny Turner & Cash McCall (rubrique « Nouveauté de la semaine »).

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© : Rock & Roll Hall of Fame/ Rock Hall Library and Archive.

Nous fêtons aujourd’hui le cent-deuxième anniversaire de la naissance de Leonard Chess, personnage extrêmement connu dans l’univers du blues qui a donc vu le jour le 12 mars 1917. Évidemment à l’origine avec son frère Phil du plus célèbre label de l’histoire du blues, Leonard vient de Motal, une ville alors polonaise mais qui se trouve aujourd’hui en Biélorussie. Je ne résiste pas au plaisir de vous donner son nom de naissance car il s’agit d’une information qui circule peu, il s’appelait donc en réalité Lejzor Shmuel Czyz. La famille Chess s’installe aux États-Unis en 1928, d’abord à New York, mais Leonard et Phil rejoignent vite leur père à Chicago, impliqué dans le commerce illégal de l’alcool en pleine Prohibition. Mais ses fils s’intéressent plus à la musique et fréquentent dès la fin des années 1930 les clubs de jazz puis de blues dans le South Side, assurant même la gestion de certains d’entre eux.

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© : Phil et Leonard Chess devant leur bureau à Chicago. © : Chicago Sun-Times via AP / Soul Bag

La suite de l’histoire nous est ensuite bien plus familière. En 1950, les frères Chess rachètent le label Aristocrat dont Leonard détient déjà des parts, et le 3 juin de la même année, ils remplacent le nom Aristocrat par Chess. C’est le début d’une incroyable aventure durant laquelle tous les plus grands bluesmen de l’époque vont enregistrer pour Chess, au plus fort du développement du blues moderne dans les années 1950. Pour la petite histoire, Leonard Chess remplacera même au pied levé le batteur de Muddy Waters lors d’une session de 1951, en jouant de la grosse caisse dans un groupe comprenant aussi Little Walter… En plus des succès générés par les réalisations des artistes maison, certains jouent des rôles importants dans le staff comme superviseurs, conseillers ou compositeurs, Willie Dixon étant bien sûr le plus notable.

Les frères Chess lancent également des filiales (Checker, Argo, Cadet), ils élargissent leur catalogue au R&B, à la soul, au gospel et aux pionniers du rock, une tendance largement initiée par Leonard, son frère Phil restant plus cantonné à la production avec une prédilection pour le blues. Dans les années 1960, Marshall Chess (né en 1942), le fils de Leonard, s’investit également de plus en plus de l’entreprise. Mais en 1969, Phil et Leonard choisissent de vendre Chess, qui restera en partie opérationnel jusqu’en 1972. Dix mois après la vente, Leonard Chess décède à 52 ans des suites d’une crise cardiaque. Les activités des frères Chess s’étendaient à la production et la distribution d’autres marques, voire au réengistrement de morceaux préalablement réalisés par des artistes pour d’autres labels, mais en y ajoutant des musiciens de leur choix. Ce fut le cas du chanteur et guitariste Floyd Jones, qui enregistra Dark Road en mars 1951 pour J.O.B., puis de nouveau pour Chess en décembre de la même année, avec notamment Little Walter et Jimmy Rogers. C’est bien sûr cette version de Dark Road que j’ai choisie pour mon émission…

 

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© : Amazon

Ma nouveauté de la semaine est un CD de Benny Turner et Cash McCall, qui vient de sortir chez Nola Blue et s’intitule « Going Back Home ». Ce sont deux chanteurs et instrumentistes expérimentés qui œuvrèrent beaucoup comme accompagnateurs à Chicago dès les années 1950. Je tiens ici à m’excuser car j’ai inversé leurs années de naissance dans mon émission, les dates mentionnées ici sont donc les bonnes. Né le 27 octobre 1939, Turner est un frère de Freddie King dont il fut le bassiste, mais il travailla aussi avec Mighty Joe Young et Marva Wright. McCall, qui naquit le 28 janvier 1941, est un guitariste qui collabora avec Willie Dixon, je lui avais consacré une rubrique de mon émission et un article le 28 janvier 2019. Si Turner a mené une carrière solo prolifique, McCall n’avait rien enregistré depuis… 1987 !

McCall souffre d’ailleurs d’un cancer du poumon et ne prend pas un solo de guitare sur le CD, mais compte tenu de sa maladie il chante plutôt pas mal sur quatre morceaux : Spoonful, It Hurts Me Too, The Dirty Dozens et son classique Money. Turner chante d’une voix très puissante mais expressive sur les autres morceaux, sauf sur Bring it on home qu’il laisse à son invité Billy Branch. C’est du Chicago Blues moderne avec de bons musiciens dans l’esprit, dont Johnny Sansone à l’harmonica, Butch Mudbone à la guitare slide et Raishene Webb aux claviers. L’ensemble est donc sympathique et passe sans ennui, mais on aurait aimé plus de compositions personnelles car les reprises de classiques sont nombreuses. Il faut en effet ajouter aux chansons déjà citées Shake Your Moneymaker ou encore Built for Comfort… Ce disque permet surtout de réentendre Cash McCall, et on espère qu’il se remettra au mieux… Je vous propose dans mon émission d’écouter le duo avec Benny Turner au chant pour leur lecture du classique de Willie Dixon Built for comfort.