Illustration de 1825 montrant à gauche un joueur d’un instrument rappelant la kora et un autre du violon ouest-africain. © : Blogs – The British Library.

Le sujet de la rubrique consacrée aux musiques guadeloupéennes pour cette semaine est tout trouvé, et il porte sur une conférence intitulée « Musiques antillaises et afro-américaines, une histoire parallèle » samedi 16 septembre 2023 à 18 heures à l’écomusée sur le site de l’habitation Murât à Grand-Bourg sur l’île de Marie-Galante. Je l’animerai dans le cadre des Journées européennes du patrimoine avec Pierre Cafournet, historien et spécialiste reconnu du patrimoine local, dont bien entendu ses traditions musicales. Je compte proposer la conférence Facebook live sur mon profil à cette adresse (elle sera de toute façon enregistrée), et je rappelle aux personnes de l’Hexagone les six heures de décalage avec Marie-Galante : à 18 heures ici, il est minuit chez vous… La conférence se déroulera en trois parties : « Introduction, origines et contexte », « Les instruments et le chant » et « Ouverture d’une nouvelle ère ». Sans bien sûr vous dévoiler le contenu, je vous propose un extrait du texte dont je me servirai (mais ici un peu étoffé), consacré au violon.

© : Daniel Léon.

– En Afrique de l’Ouest et notamment en Guinée, au Sénégal et en Sierra Leone il existe une très ancienne forme de violon qui porte de nombreux noms selon les pays, les plus courants étant soku, goje, nyanyeru et n’djaraka. Nous l’appellerons violon ouest-africain. À première vue, il ressemble beaucoup à un banjo, avec sa demi-calebasse, sa peau de chèvre et son long manche, mais il compte une seule corde. En revanche, on en joue à l’aide d’un archet dans une position proche de celle du violon. Il s’agit d’un instrument très archaïque, fabriqué comme le banjo aux Antilles et aux Amériques par les premiers esclaves. Mais ses limites imposent une évolution. En Europe, depuis le début du XVIe siècle, on connaît le violon classique avec sa forme en 8, ses 4 cordes et son archet. Mais c’est l’instrument de la musique classique et de l’aristocratie, même si on l’utilise à partir des années 1650 pour des danses plus populaires, comme la contredanse puis le quadrille en France, ou bien dans la musique folklorique irlandaise. Dès lors, une nouvelle fois avec les colons, le violon va s’exporter aussi bien aux Antilles qu’aux Amériques.

© : Discogs.

– Aux Antilles, il est présent dans le quadrille évoqué par ailleurs. Aux États-Unis, ce sera dans la square dance (la danse au carré !), qui se pratique aussi avec quatre couples, puis dans la musique cadienne en Louisiane. Et avec l’influence de l’Angleterre et de l’Europe, il n’est plus question d’aristocratie, et l’instrument que l’on appelle aussi fiddle va se répandre dans les régions rurales défavorisées. C’est la musique de la campagne, autrement dit la country music même si elle prendra ce nom bien plus tard, dans les années 1920, tout comme la folk music. Du XVIIIe au début du XIXe siècle, les Afro-Américains adeptes du violon et du banjo sont souvent sollicités pour animer des soirées, des réunions de famille et entre amis, pas seulement entre Noirs, mais aussi régulièrement par des propriétaires blancs qui se souviennent du côté bourgeois du violon…

Dennis McGee, pionnier du violon cajun. © : Chris Strachwitz / The Arhoolie Foundation.