Arnold S. Caplin en 1976. © : Alan Caplin / Stefan Wirz.

Qu’il s’agisse des pionniers du ragtime, du jazz et du blues, le label Biograph nous a donné accès à des centaines d’enregistrements historiques fondamentaux. La marque est fondée en 1967 par Arnold S. Caplin, à propos duquel les éléments biographiques sont plutôt lacunaires. On sait toutefois qu’il vit le jour le 8 mai 1929 dans le quartier de Brooklyn à New York, qu’il s’intéressa aux arts graphiques (dessin, peinture), qu’il participa à la guerre de Corée (1950-1953) et qu’il exerça professionnellement comme batteur de jazz. Cette dernière activité le mena très certainement à se passionner pour les enregistrements anciens de musique afro-américaine, et la création de Biograph fut pour lui un moyen de préserver ce patrimoine artistique.

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Dès 1968, Catlin entreprend de rééditer des pionniers du blues, et sort un album inaugural (le premier de la série 12000) consacré à Blind Lemon Jefferson, intitulé « Blind Lemon Jefferson 1926-1929 », suivi d’un autre de Ma Rainey, « Blues the World Forgot 1924-1928 », avec dans les deux cas des notes signées du producteur et auteur spécialisé Larry Cohn. Le troisième de la série, le numéro 12002, porte sur le jazz avec un disque des O’Bryant Washboard Wonders, « Back Alley Rub 1924-1926 », illuminé par la délicieuse clarinette d’un Jimmy O’Bryant (prob. 1896-1928) hélas disparu bien trop tôt… Pour Biograph, le ton est donné avec à suivre des albums, si on s’en tient au blues, de Blind Blake, Ramblin’ Thomas, Mississippi John Hurt, Blind Willie McTell, puis des compilations de faces rares et des bluesmen populaires lors du Blues Revival dont Skip James, Son House, Fred McDowell, Furry Lewis, Buddy Moss, Reverend Gary Davis, la liste est très longue…

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En 1970, Catlin acquiert Melodeon Records, un label fondé par Richard K. Spottswood (1937-) en 1964, dont le catalogue intègre des bluesmen déjà réédités par Biograph (Skip James, Blind Willie McTell), des jazzmen, mais aussi des artistes de cajun et de country. À peu près à la même époque, il remonte très loin dans le temps, et grâce au rachat des droits de QRS Records, il ouvre Biograph aux précurseurs du ragtime en ressortant pour la première fois des piano rolls, ces rouleaux perforés pour piano apparus dans les années 1880 et très populaires dès la décennie suivante. Les plus grands précurseurs du ragtime et du piano jazz « renaissent » ainsi, de Jelly Roll Morton à Scott Joplin, en passant par Fats Waller, Eubie Blake, James P. Johnson et autre James Scott, sans oublier… George Gershwin ! Repris en 2002 par Retropolis Entertainment, Biograph sera rebaptisé Shout! Factory l’année suivante. Quant à Arnold C. Caplin, il nous a quittés de 25 décembre 2009 à l’âge de quatre-vingts ans, et bien qu’il soit méconnu, son legs ne saurait être sous-estimé.

Compilation sur laquelle apparaît Pee Wee Hughes, dont le nom est hélas orthographié Huges… © : Stefan Wirz.

Voici maintenant une sélection de dix chansons, merci de noter que les dates mentionnées sont celles des enregistrements originaux, les rééditions étant bien sûr plus tardives.
Got the blues par Blind Lemon Jefferson en 1926. Premier titre réédité par Biograph.
Titanic man blues par Ma Rainey en 1926.
Shake that thing par les O’Bryant Washboard Wonders en 1926.
Bootleg rum dum blues par Blind Blake en 1928.
Hard Dallas blues par Ramblin’ Thomas en 1928.
You can’t get stuff no more par Blind Willie McTell en 1949.
Country boy blues par Pee Wee Hughes en 1949. Une rareté… mais une merveille !
Poor little angel girl par Dennis McMillon en 1949. Pas très courant non plus…
Cypress grove blues par Skip James en 1964.
Hey lawdy mama par Buddy Moss en 1966.

 

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